Mon premier contact avec le plafond de verre remonte à environ 6 ans. J’ai eu la chance d’avoir comme Professeure Jacqueline Laufer qui eu la lourde tâche de m’enseigner les fondements de que ce que l’on appelle communément la Diversité. Pour être franc, ce n’est pas la matière qui m’a le plus attiré de prime abord. Plafond de verre, statistique ethnique, place du handicap en entreprise… Pour l’homme blanc (de bonne famille) que je suis, cela apparaît de prime abord comme autant de non-sujet. Nous ne sommes pas tous égaux fasse à la discrimination et Jacqueline Laufer a su « planter une graine » dans mon esprit, laissant au temps la possibilité de la faire germer.
Il semblerait que le pari a été gagnant.
Tout retour vers la case foyer est perçu comme une rétrogradation
Six ans plus tard, me voici heureux papa et ardent blogueur sur l’égalité des chances entre hommes et femmes. Je devrais plutôt dire sur LES égalitéS des chances car, au final, on peut dire que la discrimination est à tous les étages. Toutes ne se valent pas, mais toutes existent et, au final, tout le monde est perdant. Il y a bien évidemment le fameux plafond de verre qui empêche les femmes de s’élever socialement par le travail. Il y a aussi le plancher de verre empêche les hommes de (tomber) s’élever socialement par la paternité. Si la définition qu’en donne l’association « Mercredi-c-papa » est séduisante, la « verticalité » de l’image me gène quelque peu. A moins de changer l’intégralité de nos représentations, le succès, la réussite se font toujours par le haut. Il en résulte une hiérarchie de la discrimination qui fait qu’une femme qui ne parvient pas à s’épanouir professionnellement est forcément plus malheureuse qu’un homme qui ne parvient pas à s’épanouir dans le cadre familial. Tout retour vers la case foyer est perçu comme une rétrogradation. Pas étonnant qu’il soit difficile de trouver des hommes volontaires pour prendre leur congé parental.
Tant que l’épanouissement se fera par le haut (par le professionnel), la domination sera masculine. Pour autant, est-il simple pour un homme de tout lâcher pour s’occuper de ses gamins ? Indiscutablement, non. Si j’en crois mon expérience et celle de mes camarades blogueurs, l’homme est perçu comme un intrus dans ce monde de femme.
- Un homme à la maison, c’est un homme qui laisse sa femme porter la culotte (perso, ça me va, je ne mets que des boxers).
- Un homme à la maison c’est un chômeur qui s’occupe de ses gamins le temps de retrouver un boulot (Si c’était par choix, ca se saurait).
- Un homme qui s’occupe d’enfants, c’est pas un peu louche ?
- Et puis est ce qu’un homme ça a vraiment envie de s’occuper de la maison ?
Sur ce dernier point, je suis un peu sur ma faim car j’ai vu très peu d’études cherchant à comprendre les aspirations des hommes en matière de vie personnelle. J’ai trouvé des études mesurant l’implication des deux sexes dans les tâches ménagères, j’ai trouvé des études exprimant les attentes des hommes vue par les femmes. Je n’ai toujours pas trouvé d’études mettant en avant les motivations des hommes ainsi que les (éventuels) freins à passer à l’acte.
Est ce qu’au final, ça n’arrange pas tout le monde de ne pas savoir ce que veulent les hommes ?
On nous renvoie l’image d’Epinal de l’homme pourvoyeur de revenu sans vraiment savoir si la situation lui plait. Peut être parce qu’au fond, tout le monde s’en fout. Peut être parce qu’au fond, ça arrange tout le monde. Les féministes pourront toujours râler contre le Patriarcat, les maternantes préserver le lien si spécial qui relie la mère et l’enfant et les hommes pourront éviter la corvée de repassage et de changement de couches. Faut être sincère, s’occuper de la maison, ça n’a rien de palpitant.
On peut toujours énumérer les faits, on peut toujours essayer de trouver une explication historique, on peut toujours faire des pétitions pour dénoncer. Concrètement, on fait quoi pour que ça change ?
On force les grands méchants hommes à prendre un congé parental ? On leur fait une émission de télé réalité pour qu’ils profitent des commentaires d’un coach ? On leur mâche le travail en faisant des signalétiques adaptées à leur incompétence manque d’expérience en matière d’habillage d’enfants ? On développe une presse masculine pour leur faire comprendre ce qu’est un homme moderne, un vrai ?
Le problème est complexe, c’est un fait. Nous vivons dans une époque où tout est compartimenté, où l’on préfère exclure qu’inclure. Et c’est justement cette compartimentation qui me semble problématique.
Ce n’est pas le plafond ou le plancher qu’il faut briser, mais les murs
Si j’ai mis ma vie pro entre parenthèses pour partir en province, ce n’est pas pour être gentil ou par militantisme. C’est juste parce que je n’avais pas de raisons valables de demander à ma femme de refuser sa promotion. Quitte à mettre quelqu’un en « difficulté » professionnelle, pourquoi ce serait forcément ma femme ? Je ne l’ai pas vécu comme un sacrifice (d’autant que j’ai retrouvé un travail passionnant il y a 6 mois) mais d’un projet de couple où les deux ont eu voix au chapitre. J’ai profité du congé maternité de ma femme pour prendre une mission sur Paris et aujourd’hui, nous essayons de faire au mieux pour que tout le monde soit heureux.
J’ai la chance d’avoir un patron compréhensif sur les questions de parentalité (il vient d’avoir un garçon) et me permet de m’organiser comme je l’entend. En échange, j’ai fait rentrer mon travail chez moi pour pouvoir faire du télétravail dans de bonnes conditions. Plus que le plafond ou le plancher, c’est le mur entre la vie professionnelle et la vie personnelle que j’ai abattu. Il me semble que ce cloisonnement apporte plus d’inconvénients que d’avantages.
On demande à l’entreprise de faire de plus en plus d’efforts pour prendre en compte la parentalité en entreprise, on lui demande des places en crèches, de pouvoir faire du télétravail… Le mur qui, jadis, séparait vie professionnelle et familiale est déjà largement fissuré. Pourquoi ne pas le faire sauter définitivement et passer d’une logique de compartimentation à une logique d’équilibre qui favoriserait les passages entre ces deux mondes.
J’ai un peu souffert du regard des autres qui me voyaient arrivé dans ce monde de femmes. Ce sont les mêmes qui m’ont regardé étrangement quand j’ai crée mon activité. A croire que l’on fuit toujours quelque chose.
J’ai adoré l’auto-entreprise pour ça. Ca m’a permit de m’occuper de mes enfants sans couper le lien avec le monde du travail (qui est le principal problème du congé parental) . Je pense que son rôle dans la politique familiale devrait être davantage mis en avant (plutôt que de dire que c’est du sous-salariat). J’ai beaucoup de contacts twitter qui sont auto-entrepreneurs car c’est un statut qui leur permet de mieux jongler. Alors que l’on parle de réforme de la CAF, rien n’empêche d’imaginer des modèles où les parents soient aidés dans la mise en place d’un équilibre vie pro/vie perso et que cet équilibre soit construit par les deux membres du couple.
Mais bon, c’est long, compliqué et ce n’est pas en signant une pétition que cela avancera. De toute façon, on n’a pas le choix. Tant que l’homme ne sera pas plus investi à la maison, les femmes traîneront leur 25% de salaire en moins (et là tout de suite, ça fait moins rire).
J’adhère totalement aux propos que tu tiens dans ton article, et même si pour certains papas s’occupaient des enfants ne pose aucun problème, je crois malheureusement qu’encore trop de papas (et mamans) estiment que ce n’est pas à eux de le faire. J’aimerai comme toi que cela évolue et que surtout le regard des gens change pour accepter que chacun à le droit de faire ce qu’il veux.
j’ai arrêté de travailler il y a 30 ans pour m’occuper de ma fille donc l’on peut dire que je suis un précurseur. ce n’était pas parce que ma femme gagnait plus mais parce qu’elle aimait plus son travail que moi. les résultat sont que j’ai une relation fantastique avec ma fille que peu de père peuvent se vanter d’avoir avec leurs enfants donc si vous voulez savoir les avantages que cela apporte a très longue échéance contacté moi
Avec grand plaisir
Merci pour cet article qui donne une vision masculine des difficultés rencontrées dans la conciliation des temps de vie.
Je mettrais « juste » un bémol sur le fait d’abattre les murs entre la vie pro et la vie perso car il faut quand même préserver une part de vie privée. Avec les nouvelles techniques d’information et de communication, le professionnel entre déjà bien assez dans la vie personnelle : réception de mails, de sms, d’appels téléphoniques même en congés… Tous les employeurs n’ont pas la même notion de respect de la vie privée.
Lors d’intervention en entreprise sur la question de l’articulation des temps, ces problèmes d’intrusion de la vie pro dans la vie perso sont assez récurrents. Une salariée ne supportait de se faire sermonner par son chef de service parce qu’elle n’avait pas répondu en arrivant au travail au mail qui lui avait été adressé à 3 heures du matin !
L’observation de l’équilibre des temps et de la parentalité en entreprise a travaillé sur une charte en ce sens et il serait bien que bon nombre d’employeurs en prennent connaissance.
Je partage votre billet sur ma page FB !
Je suis tout a fait d’accord. Il faut être vigilant et ne pas se faire bouffer.
N’attire quand même votre attention. Sur le fait que la vie perso intégré de plus en plus les entreprises (location de berceaux, télétravail…)
Ca se met doucement en place. On ne peut que l’encourager